Mohamed Maghnaoui, le Bruce Lee marocain

Publié le par wushuams


Il aurait été une star s'il le sport où il évolue avait le rayonnement requis. Le Wushu, branche du Kung Fu, est en effet encore méconnu dans notre pays où l'athlétisme et les jeux collectifs s'accaparent la part du lion en terme de popularité et de financement. L'histoire du Wushu est aussi vieille que celle de son terreau, la Chine.
Il se divise en deux grandes conceptions de combat : la méthode neijia qui met plus l'accent sur la force intérieure, et la méthode weijia qui repose plus sur l'usage de la force et les mouvements rapides. Ce sport a été introduit au Maroc e 1991, par Maître Cherkaoui Abdelghani, qui a créé une association et ouvert un club à Salé (Club Al Mostaqbal Arriadi). Il l'a dédié aux amateurs de ce sport encore exotique. Parmi ses premiers élèves, un gamin de 11 ans, du nom de Med Maghnaoui.

L'enfant se donnait corps et âme au point de susciter l'admiration de son maître. Il débordait d'énergie et faisait montre d'une discipline exemplaire, qui lui valurent le respect du groupe. L'enfant était en fait guidé par son instinct. Il est né pour ce sport. Il avait juste soufflé ses 14 bougies en cette année 1995 quant il fut rappelé en Equipe … Nationale ! Il doit cet honneur, pour ne pas dire ce droit, à un expert français, qui supervisait un stage à l'Institut My Rachid. Le jeune prodige n'a pas échappé à l'œil du connaisseur français. En cette année-là, il obtint la ceinture noire, 1ère Dan.

Son baptême international fut au Championnat du Monde à Rome, en 1997. Il avait juste 16 ans. Les responsables ne nourrissaient aucune prétention sur le plan du résultat, mais voulaient tout simplement lancer le jeune lionceau dans le bain afin qu'il puisse s'acclimater aux joutes internationales. Il était le plus jeune participant à cette manifestation. “ J'ai eu un sentiment bizarre, où se mélangeaient la joie et le rêve. Je ne pouvais réaliser que je m'étais hissé à un tel rang parmi le gotha mondial ”. Med sera de la partie au Championnat du Monde de Hong Kong (1999).

Il fit mieux qu'à Rome, se classant 26ème, une réalisation plus qu'honorable vu son âge, le nombre de participants venus de 82 pays et le gabarit des champions présents. Comme l'appétit venait en mangeant, Med finira par monter sur le podium à l'édition suivante en Italie (2001). L'année d'après, il frappera de nouveau un grand coup en remportant le titre de champion afro-asiatique de sa spécialité (Chan Chuan). Sa notoriété est établie sur la scène internationale.
Tout cela eut cependant un prix, fort au demeurant : l'abandon des études.

Med a rangé son cartable d'écolier pour jeter son dévolu sur ce sport devenu sa raison d'être. Son père, ex boxeur, acquiesça. Il gardait la foi en la justice du destin qui a conduit son rejeton dans ce sentier sinueux et surtout obscur. Dans tous les cas, aucune force n'aurait dissuadé le gamin. Il va s'imposer comme numéro national de Wushu à partir de 1999. Il fit main basse sur de championnat du Maroc depuis lors. Il obtint la 3ème Dan, en 2004.

Med n'a plus rien à prouver. Il a savouré le bonheur des victoires et de la participation au plus haut échelon de la hiérarchie mondiale. Mais ce bonheur n'est pas complet car, au fond de son regard, se dégage une lueur de tristesse. Le champion a tout gagné dans sa vie sportive mais rien sur le plan matériel. Il est sans emploi ! En seigneur, il ne veut rejeter la responsabilité sur personne, quand bien même il y a des responsables quelque part.

Animé d'une foi inébranlable, il confie son sort au bon Dieu et garde l'espoir en l'avenir. Ah, s'il pouvait disposer des conditions matérielles et financières ! “Croyez-moi, je serais sans doute n°1 mondial et au pire des cas n°2. Ce n'est pas de la fanfaronnade, mais je parle en toute connaissance de cause ”.

Brahim Oubel
Source : Le Matin
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